Beauté fatale – Mona Chollet
Les nouveaux visages d'une aliénation féminine.
« Autant l’admettre : dans une société où compte avant tout l’écoulement des produits, où la logique consumériste s’étend à tous les domaines de la vie, où l’évanouissement des idéaux laisse le champ libre à toutes les névroses, où règnent à la fois les fantasmes de toute-puissance et une très vieille haine du corps, surtout lorsqu’il est féminin, nous n’avons quasiment aucune chance de vivre les soins de beauté dans le climat de sérénité idyllique que nous vend l’illusion publicitaire. Pourtant, même si l’on soupire de temps à autre contre des normes tyranniques, la réalité de ce que recouvrent les préoccupations esthétiques chez les femmes fait l’objet d’un déni stupéfiant. L’image de la femme équilibrée, épanouie, à la fois active et séductrice, se démenant pour ne rater aucune des opportunités que lui offre notre monde moderne et égalitaire, constitue une sorte de vérité officielle à laquelle personne ne semble vouloir renoncer. »
Une citation tirée du livre de Mona Chollet dont le texte intégral est disponible sur le site de l'éditeur (le lien est en fin de billet).
Ce livre montre, analyse et démonte les injonctions de comportement faites aux femmes dans différents domaines, ce à travers la publicité, en premier chef, mais aussi au travers des discours sur les femmes, discours souvent le fait des médiasophes hommes et femmes : Bruckner, Habib, BHL, Théry, Badinter...
Avec beaucoup d'humour, en sept chapitres, sont passés au peigne fin de la critique aussi bien les modèles « clefs en mains » de féminité que le « triomphe des otaries », ces actrices ou modèles ou porte-manteaux, on finit par ne plus savoir, ces actrices dont les marques se moquent bien des talents sauf à ne voir en elles que la fonction de femmes-sandwichs... La critique porte aussi sur les ravages de l'obsession de la minceur, de la vision d'un corps qui serait « sale » et qu'il faut détoxiquer, nettoyer, maîtriser ; Mona Chollet n'analyse pas ici les revue « bio », seulement la presse féminine, et pourtant il y aurait à dire sur certaines revues « bio » au sujet de l'image véhiculé d'un corps « pur ».
Elle analyse aussi les rapports sociaux entre les modèles et la marque, ou plutôt entre les modèles et les personnes qui font la mode. Je dois avouer être tombé de haut au sujet de l'âge des mannequins. Une grande partie de cette analyse sociale de la domination porte sur les mécanismes d'homogénéisation de l'image des femmes, le racisme pour le dire en un mot.
Y a t-il un peu d'espoir ? Oui, certains témoignages montrent que certain-e-s échappent à la domination occidentale du regard sur les femmes. Tel couturier japonais désire habiller les femmes pour elles mêmes, pas pour se vendre lui. Une telle, marocaine, explique que dans les traditions de son pays on ajuste les habits aux corps et non l'inverse...
Une autre telle regrette que le discours dominant valorise davantage l'argent facile de la mode et non pas les études ; ainsi, sa sœur s'est trouvée souvent sur-valorisée par sa mère par rapport a elle, la mannequin vaut plus que la cancérologue.
L'espoir est dans l'éducation.
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Lire le livre sur le site de l'éditeur (>fr)
- À lire également un article sur Rue89 la propagande et les femmes (>fr)
- Et un sur la propagande et les hommes (>fr) sur AD’Times
- Et comme souvent ce billet en langue limousine (occitan)
Je termine ici par la bande annonce d'un film qui parle d'une époque de croissance certes, où le bonheur conforme faisait des ravages, certes, mais où l'égalité salariale n'était, pardon n'est toujours pas gagnée. Le film parle de cette lutte.