12 janvier 2007
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Nous relayons ici l'article écrit par
Réseau Sortir du nucléaire – 9 rue Dumenge – 69004 LYON – tél 04 78 28 29 22 - http://www.sortirdunucleaire.org
Nucléaire et santé
Rappel historique :
La dernière publication de l'OMS mettant en garde contre le choix du développement de l'industrie atomique fut publiée par de brillants experts réunis à Genève en 1956. J.M. Muller, Prix Nobel, figurait parmi eux.
"Le patrimoine génétique est le bien le plus précieux de l'être humain. Il détermine la vie de notre descendance, le développement sain et harmonieux des générations futures. En tant qu'experts, nous affirmons que la santé des générations futures est menacée par le développement croissant de l'industrie atomique et des sources de rayonnements. ... Nous estimons également que les mutations nouvelles qui apparaissent chez les êtres humains, seront néfastes pour eux et pour leur descendance".
De tels propos ne convenaient guère au lobby du nucléaire. En 1958, le discours de l’OMS change :
Un rapport technique, consacré à la politique à suivre en cas d’accident, publié dans le cadre de l’OMS compte un chapitre qui s’achève par ce souhait :"Cependant, du point de vue de la santé mentale, la solution la plus satisfaisante pour l'avenir des utilisations pacifiques de l'énergie atomique serait de voir monter une nouvelle génération qui aurait appris à s'accommoder de l'ignorance et de l'incertitude..."
Le 28 mai 1959, l'AIEA (agence internationale pour l’énergie atomique ) signe avec l’OMS un accord. Cet accord met fin à l'expression libre de l’OMS pour tout ce qui concerne l’impact du nucléaire sur la santé. Il stipule que les programmes de recherches de l'OMS doivent au préalable faire l'objet d'une concertation, afin que ces études ne débouchent pas sur des résultats qui risqueraient de nuire à l'AIEA.
L'accord doit éviter que la recherche ne débouche sur des résultats qui gêneraient la promotion des centrales atomiques. Ainsi, l'article I, point 3 de l'Accord précise que "Chaque fois qu'une des parties se propose d'entreprendre un programme ou une activité dans un domaine qui présente ou peut présenter un intérêt majeur pour l'autre partie, la première consulte la seconde en vue de régler la question d'un commun accord."
A l'article III de cet Accord on lit :
1) L'Agence Internationale pour l'Energie Atomique et l'Organisation Mondiale de la Santé reconnaissent qu'elles peuvent être appelées à prendre certaines mesures restrictives pour sauvegarder le caractère confidentiel de renseignements qui leur auront été fournis...
2) Sous réserve des arrangements qui pourraient être nécessaires pour sauvegarder le caractère confidentiel de certains documents, le Secrétariat de l'AIEA et le Secrétariat de l'OMS se tiennent mutuellement au courant de tous les projets et tous les programmes de travail pouvant intéresser les deux parties.
Rappelons que le but de l’OMS, exprimé au chapitre 1 de sa constitution "est d'amener tous les peuples au niveau de santé le plus élevé possible."
Le chapitre II indique comment l'OMS va parvenir à élever le niveau de santé, en exerçant en particulier les fonctions suivantes:
- fournir toutes informations, donner tous conseils et toute assistance dans le domaine de la santé
- aider à former, parmi les peuples, une opinion publique éclairée en ce qui concerne la santé.
Les termes de l’article III de l’accord AIEA/OMS (cité plus haut ) qui imposent la confidentialité, c'est à dire le silence, sont donc contraires à la Constitution de l'OMS.
Cet accord est toujours en vigueur aujourd’hui !
Controverse en matière de radioprotection :
C’est la Commission Internationale de Protection contre les Radiations (CIPR) qui fixe la dose de radiations acceptable par le public : 1 millisievert par personne et par an.
Cette commission ne fait pas la différence entre l’irradiation provenant d’une source radioactive située à l’extérieur du corps d’une irradiation provenant d’une source située à l’intérieur du corps.
Le Comité Européen pour les Risques des Irradiations (CERI) composé de 46 scientifiques considère lui qu’il ne faudrait pas dépasser 0,1 millisievert.
Il considère qu’en cas d’irradiation interne due à l’ingestion de polluants radioactifs présents dans les aliments ou inhalation de polluants radioactifs présents dans l’atmosphère, ce n’est plus la masse totale du corps qui est concernée mais une partie du corps.
Selon le CERI, le modèle de référence CIPR n’a qu’une base physique qui date d’avant la découverte de l’ADN. La situation spécifique des cellules qui avoisinent un polluant radioactif fixé (chronicité et importance de l’irradiation par unité de cellule) n’est pas prise en compte.
« Par analogie, le modèle CIPR ne ferait pas la distinction entre l'énergie moyenne transférée à une personne qui se chaufferait devant un feu de cheminée, de celle transférée à la même personne si cette dernière avalait un morceau de charbon ardent.»
Le CERI reprend les mêmes doses d’irradiation que la CIPR pour ses enquêtes épidémiologiques, mais il applique son propre modèle de calcul pour l'estimation des atteintes à la santé dues à une irradiation chronique par de faibles doses ( ingestion ou inhalation de radioéléments rejetés dans l'environnement, dans le cadre d'autorisations légales ou suite à des accidents ).
Ceci a des implications importantes pour la réglementation des rejets inévitables de la filière nucléaire, ainsi que pour la dérégulation des territoires contaminés et des matériaux issus de la déconstruction nucléaire.
Estimations des atteintes à la santé dues aux polluants radioactifs rejetés accidentellement ou non dans l’environnement à partir des années 40 (essais nucléaires atmosphériques) jusqu’à l’année 1989
Deux modèles de calcul :
Ø Total des morts par cancers, intervenues ou à intervenir sur une durée évolutive de 70 années :
estimation CIPR : 1 173 606
estimation du CERI : 61 619 512
Ø Total des cancers engendrés sur la même période:
estimation CIPR : 2 350 000
estimation du CERI : 123 239 024
Ø Mortalité infantile :
pas de prise en compte par la CIPR
estimation CERI : 1 600 000,
Ø Mort foetale :
pas de prise en compte par la CIPR
estimation CERI : 1 880 000
Ø Perte de la qualité de vie :
pas de prise en compte par la CIPR
estimation CERI : 10%
· Références bibliographiques :
- Recommandations du Comité Européen pour les Risques des Irradiations (CERI) - Effets sanitaires des expositions à de faibles doses de rayonnements ionisants, à des fins de radioprotection. Edition 2003 paru chez Frison Roche.
- Pour plus d’information sur l’accord OMS/AIEA, consultez « La catastrophe de Tchernobyl et la santé » par Michel Fernex (www.comité-bandajevsky.org )